Nicholas Brennan Shelton // One more year's come and gone |Complet|

Tout était si calme et paisible, je marchais sur un nuage qui se voulait aussi éblouissant que le soleil, ma tête avait éjecté tous les mauvais souvenirs et je pouvais enfin avoir un tête-à-tête avec moi-même, jusqu’à ce qu’un gigantesque huit rouge vint m’écraser le crâne contre le nuage, qui se révéla être mon oreiller. Les yeux ouverts, la tête aussi lourde que du plomb je tentai de voir l’heure. Oh misère! La convocation avec le doyen était dans 20 minutes. Illico, je me relevai, pris un pantalon et une chemise qui traînait dans le fond du placard, remis de l’ordre dans ma magnifique chevelure et partis aussi vite que Superman lors de ses interventions.

Arrivé à bon port, je fus étonné de constater qu’il n’y avait personne, du moins ce n’est pas moi qui allait se plaindre, les foules ce n’était pas un de mes hobbies préférés et puis ça facilitait l’accès à tous ceux et celles qui avaient réellement besoin d’emprunter ce couloir, comme moi présentement. Poursuivant mon chemin, les mains dans les poches, je croisai le regard de la charmante Betty, secrétaire du doyen, qui m’avait si souvent sorti du pétrin l’année dernière. Pas que je suis bagarreur mais, j’ai une fâcheuse tendance à user des joutes verbales, je n’y peux rien si je suis ainsi et Betty, elle, l’a très bien compris. En mode sourire charmeur je saluai cette gentille dame, qui me le renvoya tout en rougissant légèrement, fallait tout de même satisfaire ses alliés pour l’année. Soit, j’arrivai dans un vestibule où se trouvait déjà deux jeunes femmes de mon âge et un jeune homme qui semblait un peu plus jeune. Quoi qu’il en soit, ils ressemblaient davantage à des animaux en cage prêts à exploser à tout moment, plutôt qu’à des êtres humains, fallait voir comment ils tournaient autour des chaises en attendant leur tour, pauvres enfants, se torturer de la sorte était presque, et je dis bien presque, invivable. Pour ma part, j’étais très décontracté, je n’avais rien à prouver à cet homme sauf peut-être ma bonne foi. Ce ne fut qu’à mon onzième bâillement que mon nom sorti de la bouche du doyen, qui venait de pointer son nez dans l’embrasure de la porte. Ah! Ce n’était pas trop tôt! Toujours aussi serein, je me levai et le suivi jusqu’à son bureau.

DOYEN ▬ « Bonjour ! Vous devez être Monsieur Shelton, étudiant en deuxième année. Je suis ravi de vous rencontrer. Vous devez vous demander pourquoi je vous ai convoqué. Simple réponse, je souhaite juste faire plus ample connaissance. Comment s’est passé votre rentrée ? »
ME ▬ « Oh! Vous savez, la rentrée c’est la rentrée, il n’y a pas eu grands changements depuis l’année dernière. Enfin si, je ne suis plus le jeune! Alléluia! »

En réalité, tout ne se passait pas tel que prévu. Amanda et moi avions planifié d’emménager ensemble juste avant la rentrée mais, elle était partie, elle m’avait quitté sans laisser une lettre d’adieu. Elle avait préféré la mort plutôt que la vie, chose que je n’arrive toujours pas à comprendre. Elle semblait heureuse, je croyais connaître tous ses moindres secrets, il semble que je me suis trompé sur toute la ligne, puisqu’elle avait commis l’irréparable deux semaines plus tôt.
DOYEN ▬ « Oh, je vois. Je suis ravi que ça se soit bien passé. Pouvez-vous m’en dire plus sur vous ? »
ME ▬ « Merci beaucoup! Comme cela est inscrit dans mon dossier, je me nomme Nicholas Brennan Shelton, j’ai présentement 19 ans, je suis en deuxième année dans cet établissement ainsi que dans le programme d’Anthropologie des Sciences Sociales. Heum, mes parents sont, comme moi, tous deux citoyens américains de naissance et je suis née le 19 novembre 1990 au Texas. »

Pour ce qui est du reste, il n’avait pas besoin de savoir chaque détail de ma vie. En même temps, étant le doyen c’était son rôle d’accueillir tous les élèves, alors s’ils doivent tous raconter leur vie en détail, son boulot devait être fort ennuyant. La politesse a parfois ses propres limites qu’il ne faut pas franchir! Je toussotai légèrement dans mon coude avant de regarder à nouveau le doyen, qui ne semblait pas pressé de clore la discussion puisqu’il repartit sur une autre question.

DOYEN ▬ « Fantastique. Je vous ferai bien le même genre de description, mais je doute que vous trouviez ça passionnant. Alors, dites moi, pourquoi avoir privilégié notre magnifique université ? »

Je n’allais certainement pas répondre affirmativement au commentaire du doyen bien que ce n’était pas l’envie qui manque. Je n’avais aucun intérêt à connaître la vie de cet homme alors faut dire que j’étais bien heureux qu’il ne se présente pas. Je trouvai toutefois la question suivante bien intéressante. Je ne m’étais jamais posé la question, je m’étais contenté de suivre Amanda. Quel beau souvenir lorsque nous avions ouverts nos lettres d’admission ensemble, au même moment comme si nous formions un seul et unique être, ce n’était que du passé à présent. Sentant que les émotions prenaient un peu trop le dessus sur la raison, je me forçai à penser à autre chose, une histoire plus joyeuse à raconter.
ME ▬ « Une question très facile je dois dire…mes amis et moi avons toujours travaillés très dur afin d’avoir les plus belles notes possibles et je crois que cette université avait besoin d’une bande très motivée et compétitive…Étant très réputée, nous avons fait le pari d’être tous acceptés, sans cela, le perdant allait se jeter dans l’eau en saut à l’élastique! »

N'importe quoi! Pfff!
DOYEN ▬ « Je suis flatté! Peut-être pourriez-vous m’en dire un peu plus sur votre famille et votre enfance ? »

ME ▬ « Pour être honnête, mon enfance fut assez banale, vous savez les premiers pas, les premiers mots ainsi que la curiosité des objets. Aux revenus très modestes, mes parents ont fait leur possible pour nous élever, moi et mon frère, dans une ambiance favorable à l’apprentissage, tous deux enseignants, il était très difficile de ne pas avoir la plume. Que puis-je dire de plus? J’entretiens de très bonnes relations avec mon petit frère, d’ailleurs, il pensait peut-être venir poursuivre ses études dans cette université. Vous savez comment c’est d’avoir un petit frère? Il vous idolâtre au point de ne plus avoir d’identité, ce qui est assez flatteur! »

Une demi-vérité vaut parfois mieux qu’un mensonge n’est-ce pas? En fait, mon enfance était exact, très ennuyeuse et banale pour un jeune adolescent américain en soif d’actions. Évidemment, j’étais passé expert dans l’art de jouer de mauvais tours aux jeunes filles ou encore à chercher la bagarre chez les plus vieux. Toutefois, le caractère doit se forger un jour ou l’autre et ce fut le moyen que j’ai choisi pour arriver à mes fins. Je n’étais pas un ange, je menais la vie dure à mes parents, enfin pas réellement, la cible était le professeur mais, ce dernier allait toujours tout rapporter à mes parents, non mais! C’est un principe que même les enfants connaissent, on ne doit pas rapporter si l’on ne désire pas représailles! Ce n’était quand même pas ma faute! En vieillissant, je me suis un peu assagi, ou même légèrement. Je me souviens, je devais avoir 15 ans lorsque j’ai rencontré Amanda, cette fille me plaisait comme pas possible, j’étais fou d’elle mais, elle, ne semblait pas me voir. Fallait prendre les choses en main, chose que je ne fis pas n’importe comment. Le lendemain, j’avais apporté en classe, Max mon hamster, que j’avais doucement glissé dans le sac d’école de la belle Amanda. Je vous jure, je crois qu’elle m’a brisé les tympans, tellement fort était ses cris et ses larmes. Heureusement pour moi, elle me trouva irrésistible. Une belle et forte relation s’en suivi…

…Nous avons ouvert notre lettre d’admission pour l’université en même temps, tous les deux sur les nerfs, nous avons sauté de joie en sachant que nous allions être ensemble, pas vraiment pour l’université, même si celle-ci est très réputée, mais parce que nous allions passer les prochaines années dans le même environnement. La première année fut relativement facile, les programmes étaient super ainsi que les étudiants. Il y avait également de merveilleuses fêtes, un repos bien mérité, ça c’est certain. Malheureusement, juste avant l’été, Amanda vécue un deuil, celui de son paternel qui n’avait pas survécu à un accident de voitures. Je crois qu’elle ne s’en aie jamais remise, puisqu’il y a deux semaines, elle s’est enlevée la vie, juste avant la rentrée des classes. Geste que je n’aie jamais compris, puisque je croyais qu’elle allait de mieux en mieux. À présent, c’est mon tour de me sentir mal, vide et brisé. Malgré toute ma douleur et ma peine, je ne ferai pas les mêmes erreurs et j’assumerai mon existence telle quel. Les filles? Pour le moment, ce serait très déplacé, en plus, je n’ai pas envie de retrouver d’autres bras que ceux d’Amanda!

DOYEN ▬ « Charmant ! Avez-vous toujours été comme ça ? »

ME ▬ « Je crois que oui! J’ai toujours été le genre de garçon qui sait ce qu’il veut et quand il le veut, on peut appeler ça de la détermination! Je ne supporte pas l’hypocrisie ou les gros mensonges, pour moi si l’on cache quelque chose c’est qu’on ne fait pas confiance à l’interlocuteur. Comme beaucoup d’hommes, je ne crois pas être très habile avec les sentiments, ce qui peut parfois paraître comme un masque de froideur est uniquement de l’incompréhension. J’ai également un peu de difficultés à placer toute ma confiance en une seule personne, disons que cela peut me prendre quelques années avant de me laisser entre de bonnes mains. Malgré mes défauts, je sais prendre la vie à la légère, j’adore m’amuser et faire rire ceux qui me sont proches. Enfin, il faut seulement apprendre à me connaître, on ne peut pas être tous identiques n’est-ce pas? »
DOYEN ▬ « Je vois. Mis à part vos études, vous avez une ambition particulière, une passion ? Autre chose ? »
ME ▬ « Je me suis inscrit dans un domaine qui me passionne plus que tout, donc je n’ai pas honte de dire que mes études sont également ma passion. L’anthropologie a quelque chose d’attirant pour moi depuis mes plus jeunes jours. Sinon, j’aime énormément les fêtes…Mais attention, je ne supporte pas les chaussettes sales! »

DOYEN ▬ « Bien, il me semble que je ne vais pas abuser plus de votre temps. Je vous remercie de votre patience et de vos réponses. Nous nous recroiserons dans les couloirs, sans doute. »
ME ▬ « C’est moi qui vous remercie Monsieur! »

Je quittai la place en tendant la main vers le doyen pour une solide poignée de main. Tout c’était très bien passé, même si je n’avais pu dire tout ce que je pensais, je réservais cela aux futurs étudiants qui allaient collaborer avec moi. Comme j’avais dit au tout début de l’entretien, il n’y avait rien qui méritait de s’angoisser comme des lions en cages..